Le secteur des forêts en France
Les forêts françaises recouvrent 31% du sol métropolitain, soit 17 millions d’hectares. Elles sont présentes dans l’ensemble des régions et génèrent avec la filière bois plus de 400 000 emplois, en plus de jouer un rôle écologique central dans la lutte contre les changements climatiques. Ainsi, on comprend rapidement l’importance du secteur forestier en France, et les nombreux enjeux qu’il soulève. Kloros s’est penché sur les grands indicateurs et les tendances de ce secteur afin d’en restituer les principaux enjeux.
La forêt en France
- Évolution et répartition de la surface forestière
La forêt française ne cesse de s’étendre. En effet, sa surface a presque doublé en l’espace de 200 ans du fait des nombreuses plantations, d’abord pour répondre aux besoins de la révolution industrielle, puis grâce aux importantes subventions étatiques. Globalement, c’est l’est du pays qui est le plus boisé, avec des régions comme la Bourgogne-Franche Comté (près de 40% de surface boisée) ou la PACA (50% de surface boisée), mais si on exclue la Corse, le département le plus boisé de la Métropole est les Landes (61%).
Cette forêt est très diversifiée, puisqu'on y compte pas moins de 138 essences différentes comme le chêne, le hêtre, le châtaignier, le pin maritime, le pin sylvestre, l’épicéa et le sapin. À eux seuls, le chêne et le hêtre représentent un tiers du volume de bois vivant sur pied. Chaque essence a ses régions de prédilection, dans lesquelles le climat et l’environnement lui permettent de se développer rapidement. Ainsi dans le Sud-Ouest, on retrouve presque exclusivement du pin maritime, là où l’épicéa commun et le sapin vivent principalement en altitude, donc dans des régions montagneuses telles que le massif central, les Pyrénées, ou les Alpes. Le chêne pédonculé ainsi que le chêne rouvre sont quant à eux présents sur la quasi-totalité du territoire.
- Une forêt essentiellement privée
L’une des caractéristiques de la forêt française est qu’elle est détenue à 75% par des acteurs privés : exploitants agricoles et forestiers, scieries, entreprises industrielles dont l’activité a jadis nécessité la consommation d’importantes quantités de bois énergie, mais surtout de très nombreux particuliers. Elle est également très morcelée : en tout, 3,2 millions de propriétaires se partagent les 12,6 millions d'hectares de forêt privée, parfois sans même le savoir, du fait des nombreuses successions qui ne sont pas toujours clairement notifiées aux héritiers. Le reste de la forêt, publique, est détenue par l’Etat (1,7m d’hectares de forêt domaniale) ou par les 16 000 collectivités qui détiennent les forêts communales, départementales…
Les forêts publiques sont gérées par l’Office National des Forêts (ONF). En ce qui concerne les forêts privées, leur gestion est laissée à la discrétion du propriétaire jusqu’à une superficie d’environ 25 ha. Au-delà, le propriétaire est obligé d’avoir un plan de gestion, qu’il peut faire avec le gestionnaire de son choix. Cela explique en partie que de nombreuses forêts en France ne sont pas, ou peu gérées. On estime que 50 millions de mètres cubes de bois sont prélevés chaque année dans les forêts, pour une croissance d’environ 90 millions de mètres cubes, ce qui signifie qu’à peine plus de la moitié de l'accroissement naturel de la forêt est récolté, et qu’on ne touche donc pas au stock global.
- Une faune abondante
En outre, la forêt française abrite une riche biodiversité, et notamment une faune abondante : renards, blaireaux, martres, belettes, hérissons et chauves-souris… Elle est connue pour la présence d’un grand nombre d’ongulés tels que les cerfs, les sangliers, ou les chevreuils. Les oiseaux forestiers sont aussi très nombreux. On peut bien-sûr y rencontrer des pics et des cigognes noires, mais également des rapaces. Néanmoins, la majorité de la faune des forêts se cache dans le sol, les feuilles et le bois, avec les invertébrés. Les insectes qui se nourrissent du bois sont particulièrement abondants. La diversité des invertébrés ne s’arrête pas aux insectes puisqu’on dénombre plus d’une cinquantaine d’espèces d‘escargots.
La santé des forêts françaises
Dans l’ensemble, les forêts françaises sont en bonne santé, mais le développement de certains insectes nocifs pour les forêts et de maladies peut être préoccupant. Ainsi, alors qu’il était stable jusqu’en 2017, le stock d’arbres morts de moins de 5 ans a depuis augmenté de 30%, du fait de certains facteurs climatiques et sanitaires. Cette hausse est liée en partie à la multiplication des épisodes de sécheresse, puisque chaque année depuis 2015, entre 25 et 45% de la superficie forestière française est touchée par des épisodes de sécheresse sévère voire extrême. En particulier, trois essences très présentes sur le territoire présentent un fort taux d’arbres morts récents : le châtaignier, le frêne, et l’épicéa commun. Le châtaignier est l'une des essences les plus dégradées. Cela s’explique en partie par le fait que le châtaignier se trouve souvent dans des peuplements ruinés et non entretenus, mais aussi par sa vulnérabilité au chancre, une maladie très contagieuse qui attaque l’écorce du châtaignier parfois au point de le tuer.
Découverte en 2008, la Chalarose est une maladie qui s’attaque au frêne. Cette maladie a déjà atteint quasiment 200 000 ha de forêts adultes de frênes, et tue les jeunes tiges très rapidement.
Finalement, depuis trois ou quatre ans, l’état de santé général des peuplements d’épicéas communs a tendance à se dégrader à cause des attaques de scolytes favorisés par le changement climatique. Ces insectes creusent des galeries dans le bois, qui empêchent la circulation de la sève, ce qui a pour conséquence de les assécher et les fait mourir. Si l’homme ne peut bien souvent rien faire pour sauver un arbre une fois celui-ci infesté par une maladie ou un parasite, bien gérer la forêt peut contribuer à favoriser la pousse d’arbres forts, qui seront plus à même de survivre aux attaques.
Les dynamiques du marché des forêts
Le marché des forêts en France est extrêmement dynamique, et les prix ont globalement tendance à augmenter depuis 20 ans. En moyenne, un hectare de forêt en France se vend autour de 4200 euros, soit deux fois plus qu’au début du siècle. Cette moyenne est toutefois à prendre avec précaution, car le prix d’un hectare de forêt peut fortement varier, selon la taille de la forêt, son emplacement, sa topographie, ou encore les essences qu’elle abrite. Plus une forêt est grande, plus elle aura tendance à coûter cher à l’hectare, car il s’agit de biens rares et prisés des acheteurs. Ces forêts sont plus pratiques à gérer que des petites parcelles éparpillées, et offrent davantage de possibilités d’exploitation. Ainsi, le prix moyen d’une forêt de plus de 50 ha est de 6800 euros/ha. Ce prix élevé est le fruit d’une augmentation importante des prix depuis plusieurs années : + 70% en 25 ans. D’ailleurs, certaines très belles forêts peuvent facilement dépasser des prix de 10 000 euros/ha, atteignant parfois 15 000 ou 20 000 euros/ha. Ces prix s’expliquent généralement par la présence de beaux arbres, une superficie exceptionnelle d’un seul tenant, le faible taux de boisement de la région, ou encore la proximité avec une grande ville. En règle générale, c’est la rareté du bien qui en fait sa valeur car l’offre a alors tendance à être trop faible pour répondre à la demande. Cela explique par exemple que le Nord-Pas-de-Calais, la région la moins boisée de France, soit aussi celle où les forêts coûtent le plus cher.
L’augmentation générale du prix des forêts est liée à différents facteurs. l’un d’eux est la prise en compte de plus en plus importante du rôle écologique de la forêt. En effet, la demande de forêt augmente en partie du fait du désir croissant d’entreprises ou de particuliers de réaliser des investissements écologiques. En outre, avec le développement récent de la finance carbone et du marché de la compensation carbone volontaire, les forêts pourraient devenir encore plus rentables, en y faisant financer des projets de réduction des émissions de gaz à effet de serre par des entreprises souhaitant compenser leurs émissions. De plus, la demande étrangère de bois français, et notamment chinoise, est plus forte que jamais. Cela est notamment dû au fait que depuis 2017, l’abattage des forêts chinoises est interdit, ce qui y oblige les entreprises à venir se fournir en matière première à l’étranger, et notamment en France, d'autant plus que la Russie, dont 70% des exportations de bois étaient destinées à la Chine, n’exporte plus son bois.
Quel avenir pour les forêts en France ?
Ainsi la forêt française, grande et diverse, est à la fois un enjeu clef pour l’économie et pour l’écologie. Aussi, dans un contexte de crise de la filière bois, d’augmentation du prix du bois, d’importations massives par les Chinois et les Américains, et alors que le cadre réglementaire de la finance carbone commence à se mettre en place dans un contexte de crise climatique majeure, il sera intéressant de suivre l’évolution du secteur dans les prochaines années.
Nous serons attentifs chez Kloros à suivre toutes ces évolutions et à aider la forêt française à les traverser dans les meilleures conditions en prônant une sylviculture respectueuse des écosystèmes.